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« Il arrive souvent que l’enfant se mette à improviser une histoire qui rend
compte de son monde intérieur, de sa façon d’appréhender l’actualité familiale.
Sa création singulière est une co-création : elle s’appuie tant sur sa capacité
d’animer les objets selon son désir que sur la disponibilité psychique de
l’adulte. Il s’agit pour nous d’acter ce qu’il dit, de prendre au sérieux ce
qu’il donne à voir tout en jouant…
L’important n’est pas tant que « la » vérité soit dite, comme si elle pouvait
être une et total, mais qu’une parole vraie puisse davantage se frayer un
chemin au cœur d’une rencontre ou les idées toutes faites peuvent être mises en
doute. La plupart des adultes considèrent en effet les enfants comme « trop
petits pour comprendre » ou au contraire, comme des adultes miniatures à qui
‘il faut tout dire ». Entre ces deux extrêmes, comment tisser un échange qui
s’ouvre à la réalité de l’autre : où en est-il ? Quelles questions se pose-t-il
? Quelles réponses peut-il entendre ? Cet ajustement à tâtons est la teneur
principale de notre travail….
Les réalisations de l’enfant sont un langage en soi qu’il ne nous appartient
pas d’interpréter. Nous lui offrons une aide matérielle et une présence
soutenante pour mener à bien son ouvrage. Cela n’a l’air de rien mais
l’entreprise est essentielle….
La nécessité de chercher à reprendre pied, à sortir de l’écrasement, de tenter
de (se) réparer, de retrouver une certaine estime de soi, peut se faire
impérieuse et passer par la création d’un objet. Qui plus est, l’enfant se
sentant lâché, abandonné, est aux prises avec son impuissance et sa colère :
envie de tout détruire, de se venger peuvent faire rage. Réaliser un objet lors
de ces espaces, c’est tout à la fois tenter de pacifier la rage, apaiser la
culpabilité et tenter de restaurer le lien avec la personne décédée, en
témoignant de son amour. »
Propos tirés du Journal de
Cancer et Psychologie, Catherine Renoirte
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