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Une fille de 15 ans ayant perdu son papa récemment
     
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Je pense pourvoir dire que j'ai eu une vie jusqu'ici heureuse, ma maman m'a élevé avec tout son amour et je lui dois énormément.
Depuis que j'ai deux ans, mon père est en dépression, il n'a jamais su s'occuper de lui et encore moins de nous. Il a été dans beaucoup d'hôpitaux mais ça n'a jamais rien changé, j'étais petite et j'ai souvent des flashes qui me reviennent sans savoir d'où ça vient.
Quand j'ai eu 10 ans, mes parents ont divorcé, ma mère ne supportait plus de le voir comme ça, il fallait qu'elle le fasse pour elle aussi.

J’étais censée aller chez lui un week-end sur deux, mais j'y allais seulement 2 ou 3 h par week-end. Il habitait dans un logement social déclaré insalubre. Je trouve ça révoltant de laisser vivre des gens et de les faire payer pour un taudis pareil ! Mon père ne pouvait envisager la possibilité de vivre tout seul, il s'est donc remarié par agence matrimoniale. Cette femme me détestait et je lui rendais bien ! Au bout de 2 ans de mariage, tous s'est dégradé. Ils ne s'entendaient plus du tout. La santé de mon père aussi s'est dégradée. Il a fait plusieurs crises cardiaques, il avait des problèmes de bronches et toujours cette foutue dépression. Ca l'a bouffé pendant tellement d'années, il a tout perdu à cause de cela.

Je continuais d'aller chez lui mais il prenait de plus en plus de médicaments. L'année passée, il allait vraiment très mal. Il n'avait plus le courage de s'habiller, il ne sortait plus et s'en foutait du monde entier. Ca me rendait trop triste de le voir dans cet état-là et d'être totalement impuissante, de ne pas savoir quoi faire pour l'aider.

Et puis, il y a eu ces vacances. Juillet 2004, je suis partie avec ma mère et ma tante en France en sachant que mon père allait mal. On était là-bas depuis une semaine quand on nous a annoncé sa mort.
J'aurais voulu mourir sur place, partir avec lui, hurler mon désespoir parce que c'était mon père. J'étais loin, j'étais partie en vacances alors que lui était en train de mourir, ce n’est pas juste ... Dans ma tête, mon père était devenu invincible. Et puis, voilà, on est rentrées à Bruxelles. Il y a eu l'enterrement, je pense qu’avant de voir le cercueil, je n’avais pas réalisé. J'en veux aux pompes funèbres, je n'ai pas pu assister à la mise en bière et je ne sais même pas de quoi mon père est réellement décédé. En plus, ma belle-mère ne m'a laissé aucun objet !
Maintenant, on est 9 mois plus tard et j'ai beau réaliser plus les jours passe, plus l'écart se creuse. Je n’oublie pas ...
L'entente avec mon père n'a pas toujours été géniale mais je l'aimais et ça, je n’ai pas pu lui dire, je lui ai jamais sauté dans les bras non plus. Plein de choses qui peuvent sembler futiles mais qui, pour moi, ont maintenant de l'importance.

Pour l'instant, je vis ma vie, je sais que c'est ce que mon père aurait voulu. J’ai beau dire qu'il faut se battre, je n'y arrive pas tous les jours et il reste encore beaucoup de moments de déprime.
Voilà, du haut de mes 15 ans et demi, j'ai décidé d'exister, de ne pas me laisser marcher sur les pieds. J'ai compris aussi que rien ne reste, que chacun a son destin et qu'il ne faut jamais baisser les bras.
Et puis surtout garder le sourire et peut-être que mon papa sera fier de moi.

J'espère que ce témoignage pourra aider des personnes dans le même genre de situation ou fera peut-être même bouger les choses ...

Sophie